Le vote de la prime exceptionnelle du gérant de SARL
Le Code de commerce prévoit une procédure spécifique dans les SARL lors de la conclusion de certaines conventions entre la société et ses membres. Ces conventions réglementées doivent faire l’objet d’une approbation des associés. L’objectif est de préserver l’intérêt de la société et d’éviter un abus de la part des dirigeants, notamment en matière de rémunération. Pourtant, le vote relatif à une prime exceptionnelle du gérant de SARL est sujet à discussion.
Exclusion du dirigeant concerné pour le vote des conventions réglementées en SARL
Les conventions qui interviennent entre la société et un dirigeant ou associé doivent être validées par les autres associés en assemblée générale ordinaire. Selon l’article L 223-19, al. 1 du Code de commerce, le dirigeant associé concerné ne peut pas prendre part au vote. Les calculs de quorum et de majorité ne prennent pas en compte ses parts.
Une affaire soulève cependant une nouvelle question dans l’analyse des conventions réglementées. En effet, un associé minoritaire de SARL conteste la décision d’une assemblée générale qui attribue une prime exceptionnelle de 180 000 € à l’associé majoritaire au titre de ses fonctions de gérant. Ce dernier a participé au vote de la mesure. Le plaignant estime que l’octroi d’une telle prime constitue une convention réglementée pour laquelle l’associé bénéficiaire est exclu du vote. Il en demande la nullité. Il convient alors de déterminer si la prime exceptionnelle du gérant de SARL entre dans le champ des conventions réglementées.
Nature de la prime exceptionnelle du gérant de SARL
Concernant la SA, société anonyme, la loi soumet expressément l’octroi de rémunérations exceptionnelles aux administrateurs ou aux membres du conseil de surveillance au régime des conventions réglementées. En revanche, il n’existe pas de texte équivalent pour la SARL. La qualification de la nature de la prime exceptionnelle est donc déterminante. Si elle est analysée comme une rémunération, le dirigeant de SARL concerné peut participer au vote, même si cela concerne de sa propre rémunération. Si au contraire, la prime a la nature d’une convention réglementée, le vote de l’associé bénéficiaire est exclu.
La Cour de cassation a statué sur cette question dans un arrêt en date du 31 mars 2021. Les juges considèrent qu’une prime exceptionnelle attribuée à un gérant associé de la SARL ne constitue pas une convention réglementée, mais une décision relative à la fixation de sa rémunération. La prime exceptionnelleest une forme de salaire. Elle figure donc sur le bulletin de paie et ce sont les mêmes charges sociales qu’un salaire mensuel qui s’appliquent. La grande différence avec une rémunération classique tient au fait qu’elle peut être déterminée par une décision prise en AG.
En effet, dans un arrêt de 2012, la Cour de cassation relève que les conditions de rémunération du gérant d’une SARL sont déterminées, soit directement par les statuts de la société, soit par une décision collective des associés, prise notamment en Assemblée générale. Ainsi, la détermination de la rémunération du gérant par l’assemblée des associés ne procède pas d’une convention, mais d’une décision courante. Elle échappe donc au régime des conventions réglementées. Le gérant associé, même majoritaire, peut ainsi prendre part au vote.
Vote sous contrôle d’un abus de majorité
Même si le gérant associé a la possibilité de participer au vote concernant l’attribution de sa prime exceptionnelle, il convient de rester prudent quant au contexte de l’octroi d’un tel bonus. Le risque est en effet de s’exposer à un abus de majorité. La décision prise par un ou plusieurs associés majoritaires ne doit pas faire défaut à l’intérêt de la société ou des associés minoritaires. À ce titre, la rémunération de gérance doit être raisonnable.
C’est le cas lorsque la prime correspond à un travail effectif, sans excès par rapport à l’importance du service rendu. Pour cette analyse, l’administration fiscale a coutume d’analyser la rémunération globale sur l’année. Le montant de la prime exceptionnelle du gérant de SARL ne doit pas rendre sa rémunération excessive. Dans le cas inverse, la société s’expose à un redressement fiscal. L’augmentation de la rémunération ou l’octroi d’une prime d’un montant important peut constituer un abus de majorité si les résultats de la société sont en baisse ou que les bénéfices sont faibles.
Pour l’organisation de vos assemblées générales, rien ne vaut le point de vue d’un expert !
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