Révocation du gérant par l’associé majoritaire de SARL
Lorsqu’une société comporte une pluralité de gérants, la question de la révocation de l’un d’eux est assez simple. Il suffit de convoquer l’assemblée ou de consulter les associés par correspondance. Cela se complique dans le cas d’une SARL comportant seulement un ou deux associés gérants. La rédaction des statuts peut prêter à confusion. Comment en effet l’associé majoritaire peut-il révoquer seul le cogérant lorsque les statuts mentionnent une révocation par décision « des associés » ? Réponse en 3 points sur la révocation du gérant par l’associé majoritaire de SARL.
Possible révocation du gérant par l’associé majoritaire de SARL
Lorsque la société a un seul gérant et s’il refuse de convoquer l’assemblée, les autres associés ne peuvent pas se substituer au gérant afin d’y procéder par eux-mêmes. Seules les hypothèses du décès, de la démission ou de la mise sous tutelle du gérant permettent d’y remédier. Dans les autres cas, les associés peuvent néanmoins de demander au Président du tribunal de commerce, statuant en référé, la désignation d’un mandataire chargé de convoquer l’assemblée et de fixer son ordre du jour. Selon les juges, la révocation d’un gérant est irrégulière lorsqu’elle est prononcée au cours d’une assemblée générale convoquée par un associé, même si celui-ci est majoritaire. L’assemblée aurait dû être spécialement convoquée par un mandataire désigné en vue de voter la révocation du gérant.
Une récente affaire s’est intéressée au cas d’une révocation dans une SARL composée de deux associés. L’associé majoritaire, cogérant, décide de révoquer son associé minoritaire au cours d’une assemblée qu’il a convoquée lui-même et à laquelle il est seul présent. L’associé minoritaire demande l’annulation de l’assemblée, au motif que l’associé majoritaire ne pouvait pas le révoquer seul. Il invoque pour cela une rédaction des statuts imposant une prise des décisions relatives à la nomination ou à la révocation de la gérance par « des associés » représentant plus de la moitié des parts sociales. Les juges écartent cet argument. La rédaction de la clause doit s’entendre de manière générique, comme faisant référence à « un ou plusieurs associés » prenant part au vote.
La révocation n’impose donc pas nécessairement la présence des deux associés, dans la mesure où le votant détient plus de la moitié des parts sociales. La révocation peut ainsi résulter d’un seul associé s’il détient plus de la moitié des parts sociales. Ceci, quel que soit le nombre d’associés, qu’ils soient présents ou non à l’assemblée.
Rédaction des statuts pour définir les conditions de majorité
La révocation du gérant par l’associé majoritaire de SARL est un sujet épineux. Pour éviter tout litige, il est important de rédiger les statuts de façon claire et précise. D’où l’intérêt de faire appel à un professionnel du droit des sociétés. Les clauses doivent en effet préciser les conditions d’adoption des décisions, mentionnant le vote d’un ou plusieurs associés ou la présence d’un nombre défini d’associés. Selon l’article L 223-25 du Code de commerce, la révocation du gérant requiert une décision d’associés représentant plus de la moitié des parts sociales.
S’il est minoritaire, la révocation du gérant est acquise dès le vote d’associés réunissant la majorité des parts. Cette décision pourrait même résulter du vote d’un seul associé majoritaire. Cependant, les statuts peuvent prévoir une majorité plus élevée que la majorité légale, aux deux-tiers ou aux trois-quarts des parts sociales par exemple. Cela permet d’empêcher un associé faiblement majoritaire de décider seul la révocation du gérant minoritaire. En revanche, dans un arrêt de 2006, la Cour d’appel de Paris est venue préciser qu’il est impossible de prévoir un vote à l’unanimité, car cela aboutirait à rendre irrévocable le gérant associé.
Si le gérant est majoritaire, aucun vote positif ne pourra intervenir sur la révocation. Dans ce cas, les associés minoritaires ont pour seule solution de demander la révocation judiciaire du gérant. De même, lorsque la société est composée de deux associés égalitaires dont l’un est gérant. S’il n’y a pas de majorité possible, la révocation ne peut alors résulter que d’une décision de justice.
Révocation du gérant de SARL par décision de justice
L’alinéa 2 de l’article L 223-25 du Code de commerce prévoit que tout associé peut demander en justice la révocation du ou des gérants pour cause légitime. En cas d’urgence, la révocation peut être prononcée par le Président du tribunal de commerce du lieu du siège social.
Sont des causes légitimes de révocation judiciaire :
- La violation de la loi ou des statuts ;
- Le manquement du gérant à ses obligations ;
- La mauvaise gestion de nature à compromettre l’intérêt social ;
- La perte de confiance des associés.
Dans un arrêt récent de la Cour d’appel de Paris, les juges retiennent la cause légitime du comportement d’un gérant de société. Les juges caractérisent un manquement à ses obligations de gérant. En effet, il n’a pas tenu de comptabilité. Il a également tenu les associés à l’écart de la gestion de la société. Il a par ailleurs agi contre l’intérêt social en occupant à titre personnel des locaux détenus par la société. Autant d’arguments qui justifient la perte de confiance des associés et la révocation du gérant.
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